ça a fait huit ans que je crée. J'avais deux choix : poursuivre avec acharnement dans l'espoir de voir mes conditions s'améliorer, ou poursuivre en dilettante en développant une activité annexe.
J'ai analysé objectivement en fonction de ce que je suis profondément.
J'ai choisi la deuxième option, car il faut avouer que si j'ai un encrier au fond de moi, je n'ai jamais écrit pour la gloire et la fortune, je crois que vouloir être connu, désiré, avoir pignon sur rue est un impératif pour être artiste de métier. Il faut savoir séduire, moi je charme parfois tout au plus naturellement, mais commencer à user de je ne sais quoi d'ailleurs, pour pouvoir refourguer des bouquins, je ne sais pas faire et je n'ai pas envie d'apprendre. J'imagine qu'avec d'avantage de talent, mon travail aurait tout fait tout seul, mais je ne ferai jamais guère mieux que Rencontres, je le sais. Et puis, j'avoue que si j'ai fini par me faire violence pour me lettre en lumière (je n'étais pas même timide, tout à fait farouche, si vous saviez l'état dans lequel j'étais lorsque j'ai fait mon premier blog pour y partager mes 21 premiers mois de création !! Bigre !! L'aurais-je fais d'ailleurs si l'on ne m'avait fait miroité l'éclat d'un miroir à l'alouette que j'étais ? Je ne sais, je ne saurais jamais, c'est fait, c'est tout et puis c'est un peu comme ça qu'on s'est rencontré n'est-ce pas ?)
Oui, je suis plutôt discrète comme fille. Je ne renie pas tout ce que ma plume m'a apporté, j'en suis même encore étonnée. Je ne savais pas pourquoi, dès le début, l'auto-édition était importante. Maintenant je le sais. Ce que je cherchais ? Des gens qui apprécient mon univers tel qu'il était sorti de mon coeur, de ma tête et de mes tripes, je l'ai trouvé et je crois (j'en suis même sûre, en fait) que j'en avais besoin. Si un éditeur avait publié un de mes ouvrages, en le modifiant, forcément, je ne prétends pas faire des bouquins parfaits (sinon mon travail aurait parlé de lui même (cqfd)), je n'aurais jamais acquis cette estime et cette confiance en moi que ma plume m'a données. Ma plume m'a apporté ça par le truchement de mes lecteurs (lecteurs qui ne se souciaient ni de l'estampillage, ni des articles de presse, ni de je ne sais quoi, ils étaient juste attiré par un petit bout de mon univers, par quelque chose que j'avais en moi, donc. Je me souviens encore des yeux du public posés sur mes petits bouts d'univers exposés, ou en entendant mes histoires. J'ai gravé ça sur la pierre angulaire de mon âme, histoire que ça reste là jusqu'à la fin de mes jours. Dans le sable de ma tête, parfois j'écris des choses qui finissent par s'effacer avec le temps. Des choses importantes sur le coup mais qui doivent disparaitre chemin faisant.
Oui, rencontrer des lecteurs ayant eu une réelle affection pour mon univers, et pour moi en somme. Voilà donc ce que ma plume m'a permis.
J'avais besoin de ça pour chasser l'intime conviction d'être bonne à rien qui était profondément ancrée en moi. L'image même que j'ai de moi, en me regardant dans le miroir intime et intérieur a changé. C'est pour cette métamorphose que j'écrivais et c'est pour ça que j'ai eu raison de le faire selon mon coeur et avec ma bonne vieille tête de mule.
La réalité matérielle par contre (à laquelle il faut toujours revenir, sinon elle sait se rappeler à vous, ce sont des charges, des impôts et autres menus agréments), ma créativité évidente, aussi (je ne me vois pas cesser d'inventer, de rêver, d'imaginer un jour), et le fait que je me sente plus proche de l'artisan que de l'artiste ont pesés dans la balance pour achever de me décider. Vendre un savoir faire, je m'en sens capable, vendre... mais ça vend quoi au juste un artiste pour exister (matériellement, on ne vit pas que d'idées, d'amour pour son métier et d'eau fraiche, ben non) ?
Je ne sais pas vraiment me mettre en valeur, ça me gêne et vous connaissez l'adage, là où il y a de la gêne, y'a pas de plaisir...
Vendre quelque chose fait de mes mains pour qui j'ai toujours eu bonne estime et respect, me parait plus naturel.
J'ai longtemps cherché, céramique ? Verre ? Fer ? Je ne savais, c'est en tricotant et en laisser filer la laine entre mes doigts qu'une évidence a germé dans mon cœur, le meilleur terreau qui soit pour moi : et pourquoi pas la laine ? J'aimais déjà beaucoup les moutons, alors pour aimer la laine, il n'y avait qu'un pas, que j'ai franchi sans m'en apercevoir cette semaine. Je n'ai même pas réfléchi... Une seule fois mon intuition m'a trompée dans ma vie (parfois, je n'ai pas voulu écouter ce qu'elle disait (je suis mule) mais lorsque je l'écoutais, j'ai toujours constaté qu'elle était dans le vrai sauf cette fois là et depuis cette fois là, j'ai du mal à me dire que je pouvais encore lui faire confiance, mais il fallait que ça change et c'est ce que j'ai décidé de faire pour clore cette année, me réconcilier avec mon intuition et écouter sa voix (n'allez pas croire que je vire Jeanne d'Arc, hein ? ).
Alors mon projet artistique de 2013, Zoé, est presque bouclé, y'aura pas d'impression, des lectures publiques peut-être, une présentation à une classe de collégiens, en mai, ça c'est une certitude !!
Je n'ai été artiste que pour le bonheur et si j'aurais aimé avoir le talent que mon travail parle de lui même pour pouvoir justement avoir une vie qui coule facilement, je sens bien que pour garder ce bonheur acquis, il faut que je compte avec ma nature : je suis artisan avant que d'être artiste. L'artisan peut s'effacer derrière son travail. L'artiste lui, à moins d'être un génie, se doit aussi de briller par sa personne (j'en suis de plus en plus convaincue) et briller je ne sais pas faire, il faut que je me force et me faire violence, vraiment je n'en ai plus envie, j'aspire à la douceur. Et c'est super doux la laine !!